Abidjan le 21 Octobre 2025 – Sous les apparences d’un projet ambitieux pour fluidifier la circulation à Abidjan, le Projet de Transport Urbain d’Abidjan (PTUA) semble aujourd’hui englué dans une série de manœuvres troubles. Entre techniciens pointés du doigt, lenteurs administratives savamment entretenues et comportements méprisants, les populations impactées ne savent plus à quel saint se vouer.
Derrière la façade d’un chantier d’intérêt public, se dessine un malaise profond. Lors de plusieurs échanges avec le chef Adou du quartier Yaoséi, celui-ci a tenu à rappeler l’engagement ferme de l’État à indemniser tous les impactés recensés et reconnus par les techniciens du projet. Les bâtiments géo-référencés, censés être irréprochables, font aujourd’hui l’objet de réserves. Alors, question : les techniciens ont-ils bâclé le travail ? Et si oui, dans quel intérêt ? Les bénéficiaires de ces manœuvres se compteraient-ils dans l’ombre des bureaux climatisés de la coordination du projet ?

L’opacité semble devenue la règle dans l’exécution du PTUA. Des experts sont engagés, mais leurs rapports d’expertise des biens ne sont jamais remis aux personnes concernées. Résultat : ces dernières découvrent, souvent trop tard, que le montant réellement prévu pour leur indemnisation est bien souvent raboté d’un taux considérable. Une amputation financière que personne n’explique, mais que beaucoup subissent.
À l’origine, le gouvernement avait mis sur pied trois structures de pilotage : la Cellule de Coordination (Cc-PTUA), la Cellule d’Exécution (CE-PAR) et le Comité de Suivi (CS-PAR). Sur le papier, leurs rôles sont distincts ; dans la pratique, leurs prérogatives s’entremêlent dangereusement. Le citoyen lambda, lui, ne voit que la Cc-PTUA, perçue comme la cheville ouvrière. Mais à l’intérieur, le pouvoir réel se concentre entre les mains de quelques fonctionnaires logés au sein du ministère de Bruno Koné, ses hommes de main.

Et c’est là que les choses se gâtent. Les dossiers des impactés dorment dans les tiroirs de la CE-PAR et du CS-PAR, pilotés par des hommes qui semblent plus préoccupés par leurs primes généreuses mensuelle que par la souffrance des familles dépossédées. Parmi eux, un certain Zongo Claude, se présentant comme « l’ami personnel » du ministre Nabagné, et Kakou Michel, son complice présumé. Ensemble, ils multiplient les subterfuges : demandes de documents complémentaires inutiles, reports injustifiés, silences administratifs… Une mécanique bien huilée pour soit exproprier ou retarder les paiements et faire durer un projet dont la clôture était pourtant prévue pour fin décembre 2023. Notre correspondance adressée au Président de la CE-PAR en charge de la libération des emprises (casser les maisons) à l’effet d’obtenir les différents procès verbaux de démolition et le décret rapportant les déclarations d’utilité publique sur les zones concernées est restée sans suite.
Mais le comble du scandale se joue à la Cc-PTUA. Là, le sociologue de la structure, Gouagoua, censé apporter une approche humaine au projet, s’est toujours érigé en adversaire des impactés, donc un obstacle. Imbu de sa personne, il s’autorise propos blessants, méprisants, et refuse souvent d’écouter les doléances des impactés. Il ose même proposer des projets de déclaration de retrait de dossier d’impactés du processus d’indemnisation. Loin d’incarner l’éthique du service public, il cultive l’arrogance et entretient la confusion. Selon plusieurs témoignages, son attitude irrespectueuse et ses contradictions permanentes mettent à mal la crédibilité même de la coordination du projet.

Le 09 Octobre dernier, après une réunion avec les responsables de la Banque Africaine de Développement en charge du suivi de la mise en œuvre du Ptua, il soumet un courrier de retrait du dossier d’un impacté. Ce qui fut fait. En voici le contenu :
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»Dans le cadre de l’examen de votre plainte concernant la démolition partielle de votre bâti identifié sous le numéro PCP/FRO/0230, il a été constaté que celui-ci est situé en dehors des emprises du Projet.
En conséquence, votre bien ne sera pas intégré au Plan d’Actions de Reinstallation (PAR) du 4º Pont et n’ouvrira pas droit à indemnisation dans le cadre de ce plan. », peut-on lire dans ce courrier adressé à monsieur Kobenan Jonas.
Le Ptua nous informe également du retrait de plusieurs autres impactés. Ceux-ci contactés sont surpris de l’information. Ils n’ont reçus aucune notification alors qu’en avril 2024, lors d’un échange avec la cellule de coordination et la direction de la communication du ministère de l’équipement et des infrastructures, il nous a été indiqué que tous ceux qui n’ont reçu jusque-là aucune notification de retrait du projet sont pris en compte. Qu’est-ce peut donc expliqué cette volte face ?
Les recommandations de la BAD sont pourtant claires : il faut indemniser tous ceux qui ont été impactés par le projet ?
L’institution financière va laisser faire nonobstant les différentes alertes que nous lui avons adressées en regardant cette maltraitance ou cette roublardise de certains fonctionnaires de l’État sans agir ? Va-t-il subir le diktat de l’État de Côte d’Ivoire aujourd’hui et dans la mise en œuvre des projets à venir ?

Ainsi, le PTUA, censé être un modèle de développement urbain, s’enlise dans un climat de méfiance et de frustration. Derrière les beaux discours officiels, la gestion humaine et technique du projet prend des allures de fiasco organisé, au détriment des populations déjà fragilisées.
Face à cette situation alarmante, les autorités ivoiriennes et la BAD, principal bailleur, doivent impérativement intervenir. Il y va de la crédibilité d’un projet financé à hauteur de plusieurs centaines de milliards de francs CFA, mais surtout du respect des droits des populations impactées.
JEN
