Abidjan le 13 novemebre 2024 – Subiakro est un village de la sous-préfecture de Yamoussoukro. Il est secoué depuis 2020 par un conflit foncier à l’image de celui que vivent les peuples lagunaires de la capitale politique de la Côte d’Ivoire. En effet, pour répondre au besoin du développement, les trois quartiers de ce village que sont Subiakro, Anokro et Broukro ont décidé de procéder à de nouveaux lotissements.
Des propriétaires terriens de ces trois quartiers du village acceptent alors de mettre à disposition une superficie de 750 hectares pour ce projet d’utilité communautaire.
Dans la mise en œuvre de ce vaste projet, la partie villageoise confie sa représentation à son fils Kouassi Konan dit ‘‘Bouquin’’ dont le nom sera associé au projet. A son tour, celui-ci trouve un partenaire afin de le faire aboutir. Et le choix est porté sur Amemon Brou qui devient alors l’opérateur pour l’exécution des travaux.
Les deux associés passent le 12 Janvier 2012 une convention afin de situer les engagements, les responsabilités et les avantages des uns et des autres.
08 ans plus tard, (2020) un couac surgit. Le non-respect de la convention est au cœur du torchon qui brule. La pomme de discorde porte sur le délai d’exécution des travaux et la clé de répartition des gains de chaque partie. Dispositions pourtant bien prises en compte dans la convention signée à cet effet.
En effet, 08 ans après le démarrage des travaux qui étaient sensés être exécutés en 14 mois, les choses n’avancent pas comme prévu dans la convention. L’approbation du site mis en valeur traine. Information prise par monsieur Kouassi Konan sur le compte du capitaine Amemon Brou, celui-ci étant capitaine des douanes en fonction, n’est pas habilité à faire des travaux de lotissement.
Alors Kouassi Konan approche Sadia Dion Sylvain, Kouamelan Ahoulou Joseph, expert géomètre agréé qui assiste Ayatto Yapi dans ses travaux. Avec lui, il signe une convention de travail pour faire aboutir l’approbation conformément aux exigences du ministère de la Construction, du Logement et de l’Urbanisme. Trois (3) plus tard, après avoir passé cette nouvelle convention, les experts du domaine engagés par le maitre d’œuvre obtiennent l’approbation.
Cette signature, selon monsieur Kouassi Konan ‘‘Bouquin’’, est su du capitaine Amemon car elle ne met pas en cause les conventions signées entre ce dernier et les propriétaires terriens. D’ailleurs, souligne monsieur Bouquin Konan, c’est bien Amemon Brou qui a payé pour les ordres de recettes en ce qui concerne les quatre tranches du lotissement au guichet unique du foncier de Yamoussoukro.
Mais soupçonnant le maitre d’œuvre Kouassi Konan de manœuvre pour l’écarter du projet, le promoteur Amemon Brou décide alors de contourner ce dernier et les propriétaires terriens. Il engage d’autres partenaires sur le projet, installant le désordre et la confusion totale sur le site. Qui est alors habilité à faire quoi et qui ne l’est pas ?
Le tribunal est alors invité dans le règlement, voie prévue à l’article 09 de la convention entre les parties.
Devant ces agissements qualifiés d’incompréhensif, Kouassi Konan obtient du tribunal de première instance de Toumodi, la cessation de toute activité de Amemon Brou sur le site, le temps que les choses soient en ordre. Non satisfait de la décision, celui-ci fait appel de la décision auprès de la cour d’Appel de Bouaké. Et là, l’arrêt de la cour d’Appel renvoie les deux parties à l’article 5 de la convention qui les lie. Cet article stipule que ‘‘le Promoteur s’engage à respecter les délais de 14 mois que doivent durer les travaux, objet de la présente convention, faute de quoi, il s’expose au retrait du marché et son attribution à un tiers’’. Un arrêt qui accorde toute la légitimité d’action au maitre d’œuvre dont le souci est garantir l’intérêt des propriétaires terriens qui ont placé leur confiance en lui.
La maladresse de l’autorité administrative
Devant la tension très vive qui règne dans son village, le chef Kouassi Koffi Élysée, bien que n’étant pas partie prenante au projet, saisit le sous-préfet de Yamoussoukro, M. Kessa Godo, alors en fonction dans cette localité. Celui-ci prend le 07 avril 2021, une résolution dans laquelle il reconnaît Amemon Brou comme l’unique promoteur nonobstant l’arrêt de la cour d’Appel de Bouaké et même le fait que le capitaine Amemon ne soit adoubé par les propriétaires terriens, bottant ainsi en touche la décision de justice.
Dans sa note, libélé comme suit : « Amemon Brou est chargé de la reprise des Attestations villageoises qui avaient été signées conjointement entre lui et Kouassi Konan, représentant les propriétaires terriens et Kouamelan Ahoulou Joseph, géomètre expert agréé en fonction, afin de les soumettre aux visas et aux signatures du chef du village et des chefs de famille », monsieur le commandant prend le contre-pied d’une décision de justice et ravive les tensions à Subiakro.
Cette décision du sous-préfet Kassé Godo met en scelle le chef de terre de Subiakro, lui aussi propriétaire terrien. Il organise une rencontre avec des ‘’propriétaires terriens’’ à l’effet de démettre le maitre d’œuvre, représentant les intérêts des propriétaires terriens dans ce projet. Comme motif, Monsieur Kouassi Konan dit ‘‘Bouquin’’ est accusé de malversations. La dissidence parvient à mettre en place un bureau parallèle pour la gestion des dossiers. Une pagaille difficile à gérer en ce moment !
Ce bureau parallèle dirigé par Kouamé Koffi Dieudonné procède à la distribution des Attestations Villageoises à des bénéficiaires sur un espace dont il n’a pas contribué à l’approbation. Il s’attire alors des contestations des propriétaires se reconnaissant toujours dans les actions de Kouassi Konan dit Bouquin.
Le coup de main du sous-préfet Kassé Godo est bien saisi par Amemon Brou et son partenaire Kegnan Kouamé Alexis. Ils se font confectionner des guides d’attributions de lots et les déposent à la direction régionale du ministère de la Construction, du Logement et de l’Urbanisme. Ce comportement est qualifié d’inacceptable par des propriétaires terriens qui saisissent, par le biais de leur avocat, le ministre de la Construction, du Logement et de l’Urbanisme enfin qu’il puisse surseoir aux traitements des ACD (Arrêté de concession définitive) sur les différents lotissements de Bouquinville. Ils obtiennent gain de cause en janvier 2023.
Pour lever ce sursis, une délégation conduite par Kouassi Koffi Élysée, chef de village de Subiakro et composée de Kouamé Koffi Dieudonné, président du comité de gestion foncière du quartier de Anokro, le promoteur desdits lotissements Amemon Brou Faustin et Kegnan Kouamé Alexis son bras droit se rendent au cabinet du ministre de la Construction afin qu’il les aide à trouver une solution à ce litige.
L’inspecteur général Gui Benoit rappelle à la délégation que la convention de travail liant les propriétaires terriens représentés par Kouassi Konan dit Bouquin et le promoteur Amemon Brou Faustin n’a pas été dénoncé. Et que la clé de répartition demeure les 3 sur 10 pour le promoteur.
Au sujet de Kouamelan Ahoulou Joseph géomètre expert agréé, chef technique du lotissement Bouquinville 1, 2, 3 et 4e tranche l’inspecteur général annonce à l’assemblée que le promoteur Amemon Brou n’a pas respecté ses engagements vis-à-vis de Ayatto Yapi comme l’indique le procès-verbal de résolution à l’amiable dressé par le commissaire de justice Affloumou Arnaud Kassi en mai 2020.
Le Préfet de région de Yamoussoukro n’approuve visiblement pas l’implication du ministère de la construction dans la gestion de cette crise. Il dit ‘’s’insurger contre l’implication du ministère de la Construction dans un conflit foncier lié au partage de lots à Subiakro’’ car estimant que ce sont ‘’des détails’’ à ne pas prendre en compte.
Le rapport qu’il nous a lui-même remis sur ce conflit, donne une approche différente du règlement du litige fait par le sous-préfet central de Yamoussoukro, de même que celle de la justice et de l’analyse faite par Alexandre Kouamé ex-directeur de cabinet du ministre de la Construction.
En effet, le rapport, du sous-préfet indique que le litige se trouve entre les détenteurs de droits coutumiers. A la justice on parle de litige entre les détenteurs de droits coutumiers, le promoteur du lotissement et les auteurs techniques.
Et pourtant l’arrêté N ° 200 / MCLAU / DGUF / DDU / IGB du 20 février 2014 du ministère de la Construction instituant le Procès-Verbal de Partage des lots issus des lotissements approuvés à l’initiative des communautés villageoises est clair sur le sujet en son Article 3 :
« Le Procès-Verbal de Partage des Lots est établi sous la supervision d’un Agent Assermenté du Ministère chargé de la construction et de l’urbanisme en vue de la prise de l’Attestation Domaniale.
La copie originale du procès-verbal est transmise aux responsables des services déconcentrés du Ministère chargé de la construction et de l’urbanisme ainsi qu’au Préfet de la circonscription administrative concernée. L’opération de partage peut être constatée par voie d’huissier ».
Mais pour le corps préfectoral de Yamoussoukro, les décisions judiciaires n’ont certainement de valeur que pour celui qui les a émises. ‘’Yamoussoukro étant un havre de paix, nous ferons tout pour préserver la paix. Si nous sentons que l’application d’une décision de justice peut troubler l’ordre public, nous allons faire en sorte qu’elle ne doit pas appliquée. Nous en avons les moyens. Et c’est ça notre rôle (….)’’, a déclaré monsieur Yeo sous-Préfet central de la capitale politique de la Côte d’Ivoire.
Les mots sont lâchés. « Nous allons faire en sorte qu’elle ne soit pas appliquée. Nous en avons les moyens. Et c’est ça notre rôle », a-t-il prévenu de sa volonté de porter secours au capitaine des douanes, Amemon Brou. Une position qui conforte ce dernier qui n’hésite pas à brandir le bâton de la menace à l’endroit des journalistes qui veulent l’entendre sur les accusations portées à son encontre.
« Bonjour monsieur DOSSO, je m’appelle AMEMON Brou Faustin, financier et initiateur du lotissement dénommé ‘‘Bouquinville’’. Je suis très honoré par votre courrier me témoignant l’intérêt que vous accordez à la situation qui prévaut sur le site. Je souhaite que vous vous rapprochiez des autorités compétentes de la ville de Yamoussoukro en charge du règlement de ce problème. J’ai cité le corps préfectoral de ladite ville. Veuillez recevoir, monsieur le Directeur, l’expression de la considération », a-t-il conseillé visiblement exacerbé par la situation. « Je constate que vous êtes bien informé sur la personne. Vous n’êtes pas un me médium pour lire dans un verre de cristal. Dites-moi tout simplement la personne qui vous a mandaté. Je suppose qu’elle aura les frais alloués à cette investigation. Je veux la responsabilité de chacun », a menacé à peine voilée.
La tension reste toujours vive à Subiakro, le village du ministre Joël N’Guessan, ex porte-parole principal du RDR.
Jules Eugène N’DA